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Side view of a lonely teenage girl in a wheelchair on the platform waiting for the train with copy space. Concept of people with reduced mobility.
Manu Vega / Getty Images Side view of a lonely teenage girl in a wheelchair on the platform waiting for the train with copy space. Concept of people with reduced mobility.

Manu Vega / Getty Images

De nombreuses personnes en fauteuil roulant dénoncent publiquement le fait de ne pas pouvoir voyager en train aux côtés de leurs proches.

ACCESSIBILITÉ – « SNCF : les voyageurs handicapés n’ont pas le droit d’avoir une famille et des amis ? », interroge Audrey Hénocque. Dans un tweet, la première adjointe au Maire de Lyon a dénoncé publiquement le fait de ne pas pouvoir voyager en train aux côtés de ses enfants. C’est au moment de la réservation des billets sur Internet que l’élue, qui se déplace en fauteuil roulant, raconte avoir rencontré des difficultés.

Alors que la Conférence Nationale du Handicap a lieu ce mercredi 26 avril à l’Élysée, la question de l’accessibilité est au cœur des revendications. La ministre déléguée chargée des Personnes handicapées Geneviève Darrieussecq a reconnu elle-même sur France 2 que la France avait « du retard sur les sujets d’accessibilité ».

Pour le week-end de l’Ascension, Audrey Hénocque avait pourtant réservé quinze jours à l’avance des billets de train pour elle-même et ses enfants, sur Internet. « On s’est retrouvés dans des voitures différentes avec mes enfants, alors qu’ils ont 8 et 10 ans. Sur le site, aucune alerte ne m’a prévenue de cela », raconte-t-elle.

« C’est comme ça que commence la ségrégation »

Dans le cadre de son activité professionnelle aussi, Audrey Hénocque se retrouve seule lors de ses trajets en train. « On a par exemple un déplacement avec les élus de mon arrondissement à Paris pour aller à l’Assemblée et au Sénat, expose-t-elle. Tous les élus ont pris leur billet en 2nde classe et moi je suis seule en 1ère. C’est comme ça que commence la ségrégation. »

La difficulté viendrait du fait que dans chaque train, seules deux places sont prévues par la législation pour des usagers en fauteuil roulant (UFR), uniquement dans des wagons en 1ère classe. Une information que confirme la SNCF, « en raison de l’espace supérieur disponible pour permettre aux UFR de manœuvrer plus facilement et du plus grand confort de voyage que cela permet », nous indique-t-on.

Les personnes en fauteuil roulant et leur accompagnant ou guide éventuel paient cependant un tarif de 2nde classe, indique la SNCF. Depuis 2020, il est possible d’ajouter trois autres personnes à la réservation, qui paient « le tarif de la 1ère classe moins 30 % », indique la SNCF. Mais ces « accompagnants non-guides » se retrouvent souvent placés loin de l’UFR.

« Une demi-journée pour prendre un billet de train »

Pascaline, 37 ans, qui prend le train en fauteuil avec ses deux enfants depuis dix ans, a « toujours été emmerdée ». « Une fois, mes enfants de 8 et 10 ans ont été placés en première, mais dans un autre train, accolé au mien. C’est possible de choisir son placement quand on est valide, mais pas quand on est handicapé », dénonce-t-elle.

La SNCF justifie ces placements par manque de place dans la même voiture. « Dans ce cas, le système de placement cherche à positionner les voyageurs du groupe dans la voiture la plus proche en fonction du taux de remplissage du train. Le chef de bord peut être sollicité pour faciliter un changement de place afin de regrouper les voyageurs », nous indique-t-on.

Lors d’une simulation effectuée ce 26 avril pour un trajet Paris-Nantes sur le site de la SNCF, on nous propose ainsi deux places en voiture 1, en 1ère classe, pour l’UFR et son guide. Et deux places en voiture 13 pour les deux enfants de 5 et 8 ans.

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simulation de réservation SNCF

Une fois la réservation effectuée sur le site de la SNCF, Pascaline doit ensuite appeler le service client pour changer les places des autres personnes. Et appeler Accès Plus, un service gratuit destiné à faciliter le voyage des personnes handicapées et à mobilité réduite, pour l’accompagnement du quai au train.

« À chaque fois, il faut s’y prendre très à l’avance pour qu’il y ait des places, c’est très stressant, souligne-t-elle. Si vous avez le malheur de faire un trajet qui compte TGV-TER-Ouigo, il faut compter une demi-journée minimum pour prendre un billet de train, car ce sont des services d’assistance différents. » S’il n’y a plus de place dans son wagon, elle est obligée d’annuler ou de voyager avec ses enfants assis par terre, à ses pieds, dans l’allée.

Impossible par ailleurs de réserver un train à la dernière minute. « Les gens considèrent que lorsqu’on est handicapé, on n’a pas de travail, pas de famille, pas d’urgence, pas de contraintes horaires… » dénonce Pascaline.

« Oubliée » dans le train

Mais les difficultés ne s’arrêtent pas à la réservation. Malgré les 350 millions d’euros investis chaque année dans la mise en accessibilité des gares, la SNCF affiche environ 350 gares considérées comme « accessibles » sur les 3 000 que compte le réseau ferroviaire sur l’ensemble du territoire. Quid de celles qui ne le sont pas ? « Si la gare est indiquée comme non-accessible, c’est comme si elle n’existait pas, pour moi », regrette Pascaline.

Aussi, la plupart des trains ne sont pas à hauteur de quai. « Ça existe sur certains TER et c’est génial, car je suis libre, explique Audrey Hénocque. Alors que sur les TGV, on a besoin d’être accompagné. » Avec son fauteuil électrique qui fait 180 kg, Pascaline a déjà été « oubliée » à bord. « Si je n’ai pas de rampe, je ne rentre ou ne sors pas du train, dénonce Pascaline. Lors d’un voyage, j’avais demandé qu’on me descende à Metz. Il n’y avait personne et j’ai dû rester dans le train jusqu’à Strasbourg. »

En cas de retard ou d’annulation d’un train, lors d’une correspondance, le service d’assistance n’est pas toujours garanti, en fonction des horaires. « Une fois, mon train a été annulé sur un changement. J’arrivais dans une petite gare perdue et on m’a dit de m’arranger avec le chef de gare parce que je n’avais pas prévenu à l’avance… », s’agace-t-elle. Ces situations ont traumatisé ses enfants. « Si on veut faire une activité et qu’il faut prendre le train, souvent ils préfèrent renoncer, regrette-t-elle. Pour eux, c’est toujours une angoisse de prendre le train. »

Audrey Hénocque souhaite avec ce tweet élargir le débat à l’accessibilité du train pour les personnes en fauteuil roulant. « La difficulté d’accès aux trains montre à quel point notre société est validiste », conclut l’élue.

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