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Rythme biologique circadien ou nycthéméral : un cycle veille-sommeil

Pour être en harmonie avec les rythmes du cosmos — rotation de la Terre sur elle-même et autour du soleil, la rotation de la lune autour de la Terre — la biologie des êtres vivants s’organise autour de cycles veille-sommeil qui sont régulés par une horloge interne appelée rythme biologique.

“Chez l’homme les grandes fonctions biologiques (sommeil, rythme cardiaque, pression artérielle, mémoire, capacités cognitives, sécrétions hormonales, alimentation…) fluctuent sur 24 heures et sont calquées sur le cycle jour/nuit, c’est ce qu’on appelle le rythme circadien”, explique la Dre Ogrizek. Le mot circadien vient de deux mots latins : “circa” qui signifie “proche de” et “dien” pour “jour”.

Dre Pascale Ogrizek, spécialiste du sommeil : Notre horloge interne qui nous permet de respecter ce rythme circadien se situe dans le cerveau, dans deux minuscules structures cérébrales appelées noyaux supra-chiasmatiques et qui sont situés dans le lieu de croisement des deux nerfs optiques.

Ces deux noyaux comportent chacun quelques dizaines de milliers de neurones qui peuvent recevoir des informations sur le niveau d’intensité lumineuse ambiante. “C’est donc la lumière du jour qui agit par le biais des voies optiques, comme une resynchronisateur de l’horloge interne, qui a besoin d’être synchronisée régulièrement pour fonctionner sur des cycles de 24 heures précises”, ajoute-t-elle.

Lorsque la resynchronisation ne peut être faite de façon régulière — comme c’est le cas pour les personnes qui ne sont jamais soumises à la lumière du jour — les cycles biologiques peuvent fluctuer entre 23 h 30 et 24 h 30 en fonction des personnes et finir par se décaler totalement.

Mélatonine, cortisol : les hormones impliquées dans le rythme circadien

Les deux hormones impliquées dans le rythme circadien sont :

  • la mélatonine : cette hormone dite de la nuit (dont le nom vient du grec « mélanos » qui veut dire noir) qui favorise l’endormissement est sécrétée à la tombée de la nuit, avec un pic vers deux heures du matin, heure où le sommeil est le plus profond et la température corporelle la plus basse ;
  • le cortisol, hormone de l’éveil, prend le relais au petit matin et procure du tonus au réveil.

La sécrétion de la mélatonine est directement influencée par la lumière, mais uniquement la lumièrenaturelle du jour, dont la longueur d’onde est spécifique et différente de celle de la lumière électrique. “L’information lumineuse est captée au niveau de la rétine puis transmise par les nerfs optiques aux noyaux supra-chiasmatiques, qui transmet à son tour l’information à la glande pinéale responsable de la sécrétion de mélatonine”, résume la Dre Ogrizek. L’exposition à la lumière du jour bloque la synthèse de mélatonine alors que l’obscurité la déclenche.

Test : comment connaître son rythme biologique ?

Si nous sommes tous branchés sur le rythme circadien, nous ne possédons pas tous exactement le même rythme biologique. Quand certains sont plutôt du matin et ont tendance à piquer du nez assez tôt le soir, d’autres sont à l’inverse de vrais oiseaux de nuit qui se couchent à “pas d’heure” et ont du mal à se réveiller le matin.
“Cette différence de rythme biologique propre à chacun s’appelle le chronotype, et est fonction de l’horaire de sécrétion de la mélatonine” explique la spécialiste du sommeil.
Les couche-tôt/lève-tôt la sécrètent tout de suite dès que la nuit tombe, alors que les couche-tard/lève-tard mettent bien plus de temps à la sécréter.
Ce chronotype serait déterminé d’une part par la génétique, et d’autre part par l’environnement.

Pour connaître son chronotype, il existe plusieurs questionnaires portant essentiellement sur les préférences d’heures de réveil et de sommeil ainsi que sur les heures optimales à l’exécution de certaines activités. Le plus célèbre et utilisé est le « Morningness-Eveningness Questionnaire » établit par Horne et Ostberg en 1976. qui permet de dégager 5 chronotypes différents à l’aide de 19 questions : le type matin (score de 70 à 86), le type modérément du matin (score de 59 à 69), aucun type (score de 42 à 58), le type modérément du soir (score de 31 à 41) et le type du soir (score de 16 à 30).

Rythme circadien perturbé : quels sont les troubles du rythme circadien ?

Si la plupart du temps notre horloge interne fonctionne correctement, certaines situations peuvent la perturber et provoquer des troubles du rythme.
“En dehors de cette horloge interne qui est le chef d’orchestre de toutes les sécrétions hormonales, il y a aussi des horloges périphériques situées dans chaque organe (coeur, poumon, foie, muscle, rein, rétine) qui servent de relais lorsque l’environnement induit des situations où il est nécessaire de s’adapter” résume la spécialiste.
C’est par exemple le cas des travailleurs de nuit qui ont besoin de rester actifs pendant la nuit malgré le fait qu’ils continuent de sécréter la mélatonine puisqu’il n’y a pas de lumière du jour. Ils doivent adapter leur activité cardiaque, digestive, musculaire, respiratoire etc. à leur activité nocturne, et c’est là que les horloges périphériques interviennent.

“Habituellement ces horloges périphériques travaillent de façon autonome selon un rythme qui leur est propre mais elles doivent être resynchronisées en permanence par l’horloge interne du cerveau. Si ça n’est pas le cas, elles se désynchronisent et travaillent en cacophonie comme s’il n’y avait plus de chef d’orchestre : c’est là que l’on parle de troubles du rythme circadien” résume la Dre Ogrizek.

Ces troubles se manifestent entre autres par des changements de rythme du sommeil.

Il y a trois grands types de changement de rythme du sommeil :

  • L’avance de phase : Ce sont des sujets qui s’endorment très tôt (vers 20 heures par exemple) et se réveillent très tôt (4 heures du matin). “L’avance de phase est très fréquente chez les personnes âgées qui ont tendance à s’endormir tôt car elles s’ennuient le soir, se réveillent aux aurores et dorment dans la journée” décrit la Dre Ogrizek.
  • Le retard de phase : Ces personnes se couchent très tard au milieu de la nuit et se lèvent très tard en milieu de journée. C’est un rythme très fréquent chez les adolescents et les jeunes adultes qui utilisent les écrans pour s’endormir.
  • Le libre cours : C’est ce qu’il finit par se passer lorsqu’il n’y a plus d’accès à la lumière du jour, et donc plus de re-synchronisation des cycles. “C’est le cas chez les aveugles qui n’ont plus de perception de la lumière ou les spéléologues dont les cycles durent entre 23 h 30 et 24 h 30 sans être synchronisés, et le rythme se décale progressivement chaque jour jusqu’à être complètement inversé” résume la spécialiste.

La dépression, l’anxiété, le cancer et un certain nombre d’autres pathologies peuvent favoriser une désynchronisation de l’horloge biologique.
 

Dre Ogrizek : Les personnes qui travaillent en horaires décalés souffrent souvent de troubles du rythme biologique. De nombreuses études ont montré qu’ils étaient par ailleurs davantage sujets aux maladies cardiovasculaires, au diabète, aux ulcères, à la dépression, aux troubles cognitifs, et les femmes aux troubles de la fertilité.

Par ailleurs, le travail de nuit augmenterait les risques de cancer, et est classé comme “probablement cancérigène” par le centre de recherche du cancer.

Activité physique, alimentation : Comment régler son rythme circadien ?

Il existe plusieurs façons de réguler un rythme biologique perturbé ou de le maintenir équilibré.

L’exposition à la lumière, surtout en hiver, par le biais de laluminothérapie (ou photothérapie) : Elle consiste à s’exposer à la lumière d’une lampe dont l’intensité lumineuse se situe entre 5 et 10 mille lux, à savoir proche de la lumière du jour. “Les personnes en retard de phase s’exposeront le matin entre 30 et 60 minutes pour stimuler la vigilance. Et les personnes en avance de phase s’exposeront plutôt en soirée pour retarder l’heure du coucher” explique la spécialiste du sommeil.

L’activité physique : Faire du sport le matin avant de démarrer la journée de travail aide à activer l’horloge interne, donc à se réveiller afin de mieux dormir le soir. Si l’activité physique ne peut être que pratiquée le soir, on recommande de prendre une douche tiède juste après le sport afin de faire baisser la température interne du corps et favoriser l’endormissement,

L’alimentation : Certains nutriments ont une influence sur l’éveil et l’endormissement. “Les protéines stimulent la vigilance et doivent donc être privilégiées le matin et à midi, alors que les glucides favorisent l’endormissement et ont intérêt à être prises le soir” résume la Dre Ogrizek.
Les travailleurs de nuit doivent donc éviter de grignoter du chocolat ou des biscuits pendant leur pause au risque de piquer du nez rapidement. Une tranche de jambon, un morceau de fromage ou un œuf seront bien plus efficaces pour les maintenir éveillés et en forme.

La mélatonine : à libération immédiate ou prolongée en fonction du type de trouble du sommeil, peut être très efficace pour améliorer les troubles du rythme. La première est un complément alimentaire en vente libre et aux dosages approximatifs et la seconde est un médicament qu’on trouve en pharmacie. La mélatonine à libération immédiate peut aussi être prescrite en préparation magistrale par un médecin pour un dosage précis.

Enfin, tous les conseils de bon sens pour améliorer le sommeil sont recommandés en cas de troubles du rythme biologique : bonne hygiène de vie, horaires de sommeil réguliers et éviter les écrans une heure trente au moins avant de se coucher. En effet, la lumière des écrans (de même que celle des lampes LED) a la même longueur d’onde que celle de la lumière du jour et retarde ou stoppe la sécrétion de mélatonine, faisant, en quelque sorte, croire au cerveau que c’est le matin. Elle empêche donc de s’endormir.

Ultradiens et infradiens : Quels sont les deux autres rythmes biologiques ?

Le rythme ultradien est un rythme biologique dont la période est plus courte et la fréquence plus élevée qu’un rythme circadien : sa durée est donc inférieure à 24 heures. Ce type de rythme est présent dans de nombreux phénomènes chez l’humain : rythme cardiaque, rythme respiratoire, libération d’hormones, cycles de sommeil etc.

Le rythme infradien quant à lui, est un rythme biologique dont la période est plus longue et la fréquence plus basse qu’un rythme circadien : sa durée est supérieure à 28 heures. Chez l’humain, le cycle menstruel qui dure 28 jours, est un parfait exemple de cycle infradien.

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