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Les désirs des hommes et des femmes sont différents et plusieurs facteurs viennent l’expliquer. Raisons psychologiques ou physiologiques les questions sont nombreuses et pour y répondre nous avons interrogé Sébastien Garnero, docteur en psychologie clinique, sexologue, psychologue.

Des besoins ressentis et perçus comme moins forts chez les femmes, par les deux sexes

Si l’on en croit les sondages, tant dans les faits que dans la perception de ceux-ci, nous sommes convaincus que les femmes ont moins envie de faire l’amour :  

  • En ce qui concerne les troubles du désir : « Les femmes seraient entre 11 et 33% à connaître ces troubles avant la ménopause et 33 à 53% après. Plus d’une femme sur trois ressentirait une souffrance psychologique liée à la baisse du désir ou hypodésir, explique notre sexologue. Les hommes ne seraient qu’1 à 3% à exprimer des troubles du désir, avec une augmentation significative à partir de 50 ans. » 
  • En termes de perception des besoins sexuels selon le sexe : dans la grande enquête nationale « Contexte de la sexualité en France » (CSF 2006) : 73 % des femmes et 59 % des hommes toutes les générations confondues adhéraient à la phrase : « Par nature, les hommes ont plus de besoins sexuels que les femmes. » (source 1) 

Pourquoi une si grande différence de perception du désir ?

Si donc les besoins féminins paraissent ou sont moins importants que ceux des hommes, quelles en sont les raisons ?  

Des explications physiologiques

Dès la naissance le garçon est plus en contact avec son sexe qui est à l’extérieur et donc bien identifiable. Plus tard, son excitation sera aussi plus palpable puisqu’elle se manifestera par une érection. La petite fille en revanche, ne voit pas son sexe, qui est caché et devra davantage chercher à comprendre son corps et sa sexualité par elle-même.  Par ailleurs, les femmes ont davantage appris à accepter la frustration depuis que le monde est monde. En effet, elles ne peuvent pas forcer un homme à avoir un rapport sexuel, aussi sont-elles dépendantes de l’érection de ce dernier. Cela force la capacité d’adaptation/acceptation.  

Une forte influence hormonale

« Les règles, la maternité et la ménopause influencent le désir des femmes. Ce dernier est, par exemple, plus fort un peu avant l’ovulation ou au moment des menstrues. Ainsi, les œstrogènes influencent positivement la libido. À contrario, la prolactine (en lien avec la sécrétion de lait), a tendance à avoir un effet inhibiteur sur le désir sexuel. Raison pour laquelle, en plus de la préoccupation psychologique maternelle primaire (PMP processus psychologique jusqu’aux 6 premiers mois de l’enfant), dans les premiers mois de l’allaitement, on perçoit un fléchissement du désir sexuel chez une grande partie des femmes. Enfin, avec la ménopause, on assistera la plupart du temps à une baisse du désir sexuel et de la libido au moins dans les phases de début et d’état, pour parfois renaître plus vivement aussi chez certaines femmes. »

Les conséquences de milliers d’années de phallocratie

Jusqu’à la libération sexuelle, il pouvait être socialement plus difficile pour une femme d’exprimer ses désirs sexuels et de vivre librement sa sexualité. En effet, comme le soulignait le groupe Tryo, un homme qui aime les femmes, on appelle ça un Don Juan, une femme qui aime les hommes, on appelle ça comment ? Une nymphomane ? Une allumeuse ? Pourquoi ? Parce que cela n’arrangeait pas les affaires des hommes, que les femmes, qui portent les bébés et donc les potentiels héritiers, puissent aller voir ailleurs. Surtout si monsieur partait au combat durant des mois ! Dans l’histoire, les femmes ont été entrainées à ne pas aimer le sexe et/ou à ne pas pouvoir se l’avouer. Aujourd’hui, c’est compliqué de savoir qui de l’oeuf ou de la poule a donc entamé ces préjugés sur le désir féminin

Une mésestimation des désirs de la femme

Libido et désir sont souvent confondus : par ailleurs, ainsi que l’explique Sébastien Garnero, on prend, à tort, les termes désir et libido pour synonymes : « Or, la libido, concerne plutôt l’appétit sexuel et l’envie de faire l’amour au sens pulsionnel du terme, avec une énergie qui pousse vers un objet sexuel pas toujours déterminé.  Le désir renvoie quant à lui à une énergie poussée par une envie de faire l’amour avec une personne spécifique, un objet sexuel précis. On désire faire l’amour avec quelqu’un en particulier. Dans ce sens, on pourrait dire que la libido pulsionnelle constante  (biologique/psy) est plus du côté de l’homme, alors que le désir sexuel (psy/biologique) serait plutôt du côté de la femme. Son désir sexuel s’appuierait plus sur un versant amoureux psychologique et sentimental. Plus romantique donc, mais pas moins sexuelle. Ceci expliquerait aussi les décalages statistiques importants entre hommes et femmes concernant les activités masturbatoires autoérotiques, la Porn addiction, ou le recours à une sexualité tarifée, sites de rencontres sexuelles… » 

Une sous-estimation du désir des femmes par les hommes : une étude, menée en mai 2016, va également dans ce sens puisqu’elle a montré que les hommes ne percevaient pas les signaux du désir de ces dernières et sous-estimaient donc celui-ci. Elles avaient plus envie qu’ils ne le pensait, mais ne le manifestaient pas assez clairement pour qu’ils le ressentent (source 2). Hommes et femmes auraient ainsi les mêmes besoins et envies mais ne l’exprimeraient pas de la même façon.

Trop de désir : source de honte ?

Ainsi que l’explique notre expert, les standards et diktats pèsent sur la sexualité des femmes (comme des hommes !) : « Les femmes ayant une forte libido ont souvent l’impression de ne pas être conformes au modèle, ou à la représentation sociale attendue. À contrario, dans la logique actuelle de la sexualité perçue parfois comme facteur de réussite et de bonheur, certaines femmes pensent avoir des problèmes de désirs sexuels (hypodésir féminin, troubles sexuels) alors qu’elles ont une sexualité de qualité et pas de réel problème de désir. »

Pourtant, ainsi que le rappelle Sébastien Garnero, il ne faudrait pas oublier que, pour les deux sexes, tout n’est pas question de quantité ! « L’épanouissement sexuel dans la durée se situe dans l’unification de la composante psychologique et biologique au travers d’une harmonie amoureuse et sexuelle. » 

Libido et désir : une question de culture et d’histoire personnelle plus que de genre

Nous l’avons compris, en réalité, quel que soit le sexe, le rapport que l’on a avec la libido et le désir dépend beaucoup de notre culture, de notre éducation, de nos histoires…  

« En cabinet, on peut d’ailleurs constater que certaines femmes ont une forte libido, ou du moins plus importante que leur conjoint. Ces femmes ont le plus souvent un rapport à leur corps plus libéré et une meilleure connaissance de leurs modalités de plaisir, avec accès à leur monde fantasmatique, véritable moteur psychique de la pulsion sexuelle. Elles ont donc un plus grand nombre de désirs sexuels plus assumés et sont plus demandeuses de sexualité. », note notre expert. Et de préciser : « En effet, à l’origine du désir sexuel tant chez les hommes que les femmes, il existe de nombreux facteurs qui sont impliqués comme le rapport au corps, à la sexualité, au plaisir, etc. » Selon le parcours de chaque femme, l‘ouverture sera donc plus ou moins difficile. Mais grâce à la libération sexuelle, de plus en plus de femmes osent assumer leur plaisir à faire l’amour. 

Par ailleurs, certains peuples ont fait le choix de la polyandrie, preuve que c’est aussi la société qui crée les femmes ainsi que leur rapport au sexe ( source 3).

En résumé, si, en général, les hommes semblent avoir plus envie que les femmes, cela s’explique en partie par des aspects physiologiques et hormonaux, mais aussi d’un point de vue psychologique et culturel, car tout a été mis en œuvre pour qu’il en soit ainsi ; pour que les femmes soient moins sexuelles. De fait, leur désir s’exprime souvent plus discrètement. Mais les temps changent, et les femmes et les hommes, aussi ! 

Bien à vous et à vos désirs,

Et aussi : l’avis d’une sexologue

Il a plus envie que moi, que faire ?

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