Spread the love


Depuis quelques années, des médecins soupçonnent les produits laitiers d’être à l’origine de nombreux maux, dont les troubles articulaires. Alors que la majorité du corps médical se rallie au (PNNS) qui recommande d’en consommer deux par jour en variant les produits (lait, yaourt, fromage blanc, fromages), des voix discordantes les accusent de favoriser des dysfonctionnements au sein de l’organisme et de générer de nombreuses pathologies. Contre toute attente, celles-ci ne se limitent pas à la sphère digestive, et des problèmes articulaires peuvent apparaître.

Justifiées ou pas, ces accusations finissent par semer le doute : « la relation entre lait et articulations constitue un sujet de questionnement chez nos patients », confient les Dr Catherine Hernandez et Jean-Paul Bernard, respectivement nutritionniste et rhumatologue aux thermes d’Aix-les-Bains. « Beaucoup arrêtent d’en consommer avec l’espoir d’atténuer leurs souffrances, au risque de se retrouver carencés. »

Est-ce que le lait et le lactose sont vraiment inflammatoires ?

D’emblée, le supposé rapport entre laitages et articulations laisse perplexe : comment la consommation de lait, de yaourt ou de fromage peut-elle avoir une répercussion sur les cartilages, les tendons ou les ligaments ? Dans le camp “antilait”, on incrimine son sucre (lactose), mais aussi ses protéines.

Le lactose est une molécule complexe, composée de galactose et de glucose. Pour être assimilée, elle doit être scindée en deux dans le tube digestif par une enzyme, la lactase. Celle-ci est présente chez les enfants jusqu’à 6-7 ans, puis disparaît à l’âge adulte chez 85 % de la population. Passé cet âge, nous n’en avons plus besoin, puisque notre alimentation est diversifiée.

« La plupart des adultes ne digèrent pas le lactose qui se retrouve comme un corps étranger dans le système digestif. Le lait est alors considéré comme un poison : ses différents composants provoquent des effets toxiques dans l’intestin et s’infiltrent à différents endroits du corps, dont les articulations, où ils génèrent des inflammations », explique-t-on à l’Association du Dr Jean Seignalet, l’un des premiers médecins à avoir mis en évidence le lien entre consommation de laitages et problèmes de santé.

Les protéines dans le lait de vache sont aussi montrées du doigt

Les détracteurs accusent aussi les protéines laitières, auxquelles nous ne serions pas adaptés. « Le lait contient des protéines spécifiques d’espèces qui ne sont pas interchangeables, alerte le Dr Jean-Pierre Poinsignon, rhumatologue. Lorsqu’on donne du lait de vache à un nourrisson, on le vaccine contre les maladies bovines ! Dès lors, on perturbe le système immunitaire. Or, sur un terrain génétique favorable, cette perturbation peut favoriser à l’âge adulte des maladies auto-immunes comme la polyarthrite, les rhumatismes… »

Le problème, c’est que rien n’a jusqu’à présent été prouvé et que ces allégations reposent non sur des preuves scientifiques, mais sur de simples constatations. Et là, on entend tous les sons de cloche ! « Après avoir conseillé de supprimer tout produit laitier, j’ai constaté chez une majorité de patients une amélioration des symptômes inflammatoires. Chez d’autres, les tendinites ont disparu », avance le Dr Poinsignon.

Le lait de vache, bon pour l’arthrose ? 

Selon une étude d’observation de l’American College of Rhumatology publiée en 2014, la consommation de lait aiderait à ralentir la progression de l’arthrose du genou chez les femmes. Une autre étude néerlandaise publiée en 2019 démontrait de son côté qu‘”une consommation plus élevée de produits laitiers entiers et de fromage hollandais, mais pas de lait, était transversalement associée à la présence plus faible d’arthrose du genou“. Des études supplémentaires mériteraient de creuser le sujet pour confirmer la tendance révélée par ces deux études. 

Produits laitiers et inflammation : aucune preuve scientifique

Cependant, les expériences ne s’avèrent pas toujours fructueuses : aucune étude ne montre que les produits laitiers sont néfastes pour les articulations. Il peut y avoir des personnes qui observent des symptômes. Ces personnes peuvent avoir une spécificité, mais cela n’a pas été démontré.

« En l’absence de preuves scientifiques, on ne peut se fier qu’à notre pratique clinique courante, j’ai donc réalisé une étude sur 60 de mes patients souffrant de troubles articulaires, détaille le Dr Hernandez. Il y en a 59 pour lesquels rien n’a changé et 1 dont la vie a été transformée. Mais on ne peut pas généraliser à toute la population. »

Dans le doute, la quasi-unanimité des médecins conseille, s’il y a des douleurs articulaires avérées,de supprimer tous les produits laitiers (vache, chèvre, brebis…), pendant trois à quatre semaines. « Dans le cas d’une amélioration, et seulement dans ce cas-là, il peut être intéressant de les exclure de son alimentation pour diminuer le supposé effet inflammatoire », conseille le Dr Catherine Serfaty, nutritionniste.

Faut-il éviter les produits laitiers si l’on a des problèmes d’articulations ?

Mais ne risque-t-on pas alors des carences en calcium ? Dans le camp “antilait”, on enfonce le clou : « le calcium laitier est peu assimilé par l’homme, souligne le Dr Poinsignon. De plus, en France, les apports recommandés sont gonflés : 900 à 1 200 mg par jour selon les types de population, alors que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) les estime à 600 mg ! Une alimentation équilibrée, sans laitages, satisfait largement nos besoins sans craindre de carence ! ».

Dans le rang des “classiques”, on reste prudent : « supprimer les laitages expose à de nombreuses carences, souligne le Dr Catherine Hernandez. Et pas seulement en calcium, mais aussi en protéines, acides gras et vitamines. Pas question donc de ne plus en consommer sans raison valable ». Le Dr Catherine Serfaty renchérit : « sans produits laitiers, il est impératif de se supplémenter en calcium. Et d’augmenter la consommation d’aliments qui en sont riches. »

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *