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Depuis plusieurs semaines, la France connaît des tensions dans l’approvisionnement du misoprostol, une molécule utilisée pour les avortements médicamenteux.
PILULE – « Que fait le gouvernement pour assurer la sécurité sur la chaîne d’approvisionnement de pilules abortives ? » C’est la question posée par l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament (OTMeds), qui alerte depuis plusieurs semaines sur la pénurie de Gymiso et le MisoOne, des pilules abortives à base de misoprostol.
Le misoprostol dans ces pilules permet de provoquer l’expulsion de l’embryon. Il doit être pris 36 à 48 heures après une autre pilule, qui elle interrompt la grossesse. Le misoprostol est aussi utilisé en amont des IVG non médicamenteuses et pour l’accompagnement des fausses couches. Il est utilisé dans 76 % des IVG en France, selon la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees).

« Le misoprostol utilisé pour les IVG médicamenteuses est porté disparu dans la totalité des pharmacies à Lille et à différents endroits en région parisienne, soulignait déjà l’OTMeds le 14 avril. À ce stade, il ne s’agit plus de tensions mais bien de pénurie. Nous demandons au ministre François Braun de s’exprimer d’urgence sur le sujet, et aux élu-e-s de demander des comptes au gouvernement. Cette indisponibilité compromet concrètement le droit à l’IVG. »
Une concentration de la production
Selon les informations renseignées par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), les « tensions d’approvisionnement » sur le misoprostol datent du début de l’année. Cette alerte a été relayée notamment par le Planning familial, qui souligne son impact sur les personnes qui veulent avorter. « Des mesures doivent être prises pour que l’accès à l’IVG ne soit pas restreint », réclame le réseau associatif.
⚠️Les difficultés d’approvisionnement en pilules abortives impactent directement les pers qui veulent avorter. La s…
— Le Planning Familial (@leplanning)
Selon l’OTMeds, cette pénurie serait liée à une « concentration de la production », qui rendrait la chaîne d’approvisionnement « vulnérable ». « Le misoprostol est sous brevets, il n’y a pas de génériques, ni de produits équivalents (…), explique l’Observatoire dans son communiqué. Une production locale, diversifiée, au moins en partie publique est une réponse pragmatique à ce problème. »

Un problème déjà mentionné par le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes dans un communiqué de mai 2020. « La production des médicaments utilisés pour les IVG médicamenteuses est dans les mains d’un seul producteur, le groupe Nordic Pharma, avec des risques de rupture de production et d’approvisionnement et de pression sur les prix », écrivait le HCE, qui recommandait aux pouvoirs publics « d’exercer un vrai contrôle sur ces produits, d’avoir des stocks d’au moins quatre mois pour les produits indispensables, de relocaliser la fabrication en Europe et en France et de garantir la production des médicaments non rentables en les nationalisant. »
Protéger le droit à l’avortement
« Il doit y avoir une réponse immédiate de la part du gouvernement, souligne Sarah Durocher, présidente du Planning familial sur France Inter. Il faut absolument protéger ce droit à l’avortement. Les femmes qui sont en demande d’avortement ne doivent pas attendre pour trouver ces médicaments. »
« Alors que le ministre de la santé apportait le 8 avril son soutien aux femmes américaines face aux menaces légales et juridiques contre le droit à l’IVG, pourquoi ne répond-il pas aux acteurs de terrain alors que les pénuries menacent ce même droit en France ? » interroge l’OTMeds.

Contacté également par France Inter, le ministère de la Santé assure que ces tensions sont suivies de très près par l’Agence nationale de sécurité du médicament. Cette dernière promet d’ailleurs un retour à la normale d’ici la fin du mois d’avril.
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