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Young woman having a therapeutic session with a psychologist
LordHenriVoton / Getty Images Young woman having a therapeutic session with a psychologist

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« Je n’ose rien dire, et j’y retourne toutes les semaines » raconte Mireille, la trentaine

SANTÉ MENTALE – « C’est quelqu’un de spécial, avec qui j’avais l’impression de pouvoir être librement moi-même », décrit Giorgio pour parler du psychologue qui l’a suivi pendant six ans. Il considère son thérapeute comme une personne à part, avec qui il a expérimenté une vulnérabilité rare. Alors, lorsque son thérapeute a évoqué la fin de leurs sessions, cela a suscité chez lui beaucoup d’émotions.

Il n’est pas le seul dans ce cas : pour les patients qui se sont confiés pendant des mois à leur psychologue, l’arrêt de la thérapie peut parfois prendre des airs de rupture affective, et en faire le choix peut devenir une source de stress. Comment aborder le sujet avec son psy ? Peut-on lui donner de ses nouvelles si on en ressent l’envie ? En somme, qu’est-ce qu’une bonne rupture avec son psy ? Réponse d’une professionnelle.

Que faire quand on n’ose pas quitter son psy ?

Il y a un an et demi, Mireille a vécu une passe difficile et a donc commencé une thérapie avec une psychologue, à raison d’une séance par semaine. Si les rencontres se passaient bien, à mesure que sa santé mentale s’améliorait, elle a ressenti le besoin d’espacer – voire d’arrêter – les rendez-vous avec sa psychologue. Pourtant, elle n’a pas réussi à lui dire.

« Elle m’a beaucoup aidée mais maintenant que je vais mieux, j’y vais à reculons. J’associe nos rendez-vous à mon mal-être passé, explique la trentenaire. Le problème, c’est que je n’ose pas lui dire. Chaque semaine, je reprends rendez-vous pour la suivante, et j’ai l’impression que ça durera jusqu’à ce qu’elle me dise explicitement que je peux arrêter. »

Pour la psychologue libérale Myriam Stadler, l’arrêt de la thérapie est pourtant un sujet très loin d’être tabou pour les professionnels. « La plupart des psychologues ont l’habitude de gérer ça, on ne va pas mal le prendre ou s’en offusquer. Il est possible qu’on donne notre avis sur cette décision mais quoi qu’il en soit, la thérapie doit être un espace où les personnes peuvent dire les choses. Si elles n’y arrivent pas, elles peuvent envoyer un message ou un mail, pour ne pas avoir à appréhender la réaction de leur psychologue. »

Peut-on ghoster son psy et le rappeler ensuite ?

Faute de réussir à en parler à sa psy, Mireille a envisagé de la ghoster avant de se raviser. « Et si je disparais sans donner de nouvelles et que trois semaines après, j’ai à nouveau besoin d’aide ? Je reviens comme une fleur à son cabinet ? Je me sentirais trop mal » explique-t-elle. Une situation que connaît bien Myriam Stadler, qui ne s’en formalise pas.

« Les personnes qui disparaissent dans la nature et qui reviennent six mois après, ça arrive et à mon sens, c’est plutôt bon signe qu’ils puissent revenir quand ils en ont besoin. En tant que psychologues, nous sommes censés pouvoir recevoir tout le monde. Par contre, si leur disparitionest motivée, par exemple, par des raisons financières ou par des contraintes extérieures, c’est important d’en parler : à titre personnel, j’essaie toujours de trouver des solutions. Espacer des rendez-vous, échanger par mail ou par téléphone gratuitement… Si les patients ont encore besoin de soin, cela vaut mieux plutôt qu’ils se retrouvent sans rien du jour au lendemain. »

« Lui dire au revoir, le remercier »

Dans le cas de Giorgio, c’est son thérapeute qui a mis fin à la thérapie. « D’une fois par semaine, les séances se sont progressivement espacées, raconte-t-il. Puis il m’a dit Je pense qu’on a terminé le travail, est-ce qu’on part sur une dernière séance, ou est-ce qu’on arrête après celle-ci ?’. »

Pour Giorgio, il était inenvisageable de ne pas prévoir une ultime session. « J’aurais été très frustré de ne pas pouvoir lui dire au revoir, le remercier. Ça me tenait à cœur de lui dire que j’avais l’impression d’être devenu quelqu’un de meilleur avec lui, que j’étais satisfait et fier du chemin que nous avions parcouru ensemble. » À l’époque, il envisage même de lui écrire une lettre et de lui déposer dans sa boîte aux lettres professionnelle, ce qu’il n’aura finalement pas besoin de faire.

Peut-on revoir son psy après la thérapie ?

Aujourd’hui, Giorgio repense avec affection à ce thérapeute qui l’a accompagné toutes ces années et s’interroge parfois sur une éventuelle reprise de contact.

« Je lui ai beaucoup parlé de ma thèse, et je sais qu’il figurera parmi les remerciements de celle-ci. J’ai pensé à l’inviter à ma soutenance de thèse, mais je me dis que ce serait outrepasser la relation psy-patient, je ne lui ferais pas ça ! Je lui enverrai peut-être un message pour lui dire quand même. »

Interrogée sur la possibilité de garder une relation avec son ou sa psy après la fin de la thérapie, Myriam Stadler explique : « À partir du moment où la relation thérapeutique est terminée, si le psychologue est à l’aise, cela peut faire plaisir de voir, ponctuellement, la manière dont on a pu aider des patients et des patientes. Donner des nouvelles de temps en temps par mail ou par texto, ce n’est pas un souci ! »

Elle met toutefois en garde contre toute tentative d’aller plus loin. « On parle bien de contacts rares, et dans un cadre spécifique. Solliciter son ancien thérapeute pour devenir ami avec lui, pour moi, c’est plus compliqué déontologiquement. C’est quand même une relation déséquilibrée entre un professionnel et un ancien patient qui s’est beaucoup confié. »

En somme, pour rompre avec son psy, Myriam Stadler conseille de prendre son courage à deux mains et d’en parler. « Les patients sont libres dans la psychothérapie,’il n’y a pas de contrat ou d’engagement. Et ils n’ont pas à anticiper ou à s’inquiéter des réactions du psychologue : c’est au professionnel de les gérer pour lui-même ! »

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