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Femme musclée montrant ses bras
Masego Morulane / Getty Images Femme musclée montrant ses bras

Masego Morulane / Getty Images

Ces femmes musclées nous racontent les réflexions qu’elles ne veulent plus entendre

SPORT – « Quand on est une femme et qu’on a un physique comme le mien, on a tout le temps des remarques, de la part de tout le monde. Ma mère, mes potes, les entraîneurs, les commentateurs sportifs… », énumère Djihene Abdellilah, ancienne athlète devenue coach sportive et préparatrice physique.

« J’ai toujours eu l’impression que n’importe qui pouvait donner son avis sur mon corps », explique cette spécialiste en sports de combat, titrée championne du monde de grappling. Quand nous l’avons contactée pour notre article, elle s’est étonnée : « Cest la première fois de ma vie qu’on me demande ce que moi, j’en pense. » Djihene est très musclée et, comme tant d’autres femmes aux physiques d’athlètes, elle en a assez qu’on lui fasse certaines remarques sur son corps. Trois d’entre elles ont raconté au HuffPost ce qu’elles ne voulaient plus entendre.

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« Les mecs ne trouvent pas ça attirant, comment tu vas faire pour trouver quelqu’un ? »

En tête des remarques qui reviennent le plus souvent et qui agacent le plus les trois athlètes interrogées, il y a la question du regard masculin. Eva est bien placée pour le savoir : sur les réseaux sociaux, la créatrice de 21 ans poste régulièrement des vidéos de ses séances de musculation pour « aider les gens à se motiver ».

Elle explique que ses vidéos, notamment celles où elle montre ses bras musclés, apportent leur lot de commentaires peu amènes : « On me dit que ce n’est pas beau, pas attirant, que je ne trouverai jamais quelqu’un. Mais moi, je ne fais pas ça pour plaire aux hommes ! »

Hors des écrans, les remarques n’ont pas plus de filtre. « On me dit Tu n’as pas peur de ne pas attirer d’homme, comme ça ? À quoi ça sert d’avoir un corps comme ça, il changera quand tu auras des enfants ? »,  explique Mélanie. Cette secrétaire médicale de 24 ans pratique la force athlétique en compétition, et elle a vu son entourage changer de regard sur elle quand elle a commencé à se muscler. « Comme si le seul but de ma vie, c’était d’avoir un mec, que le seul but de mon corps, c’était de procréer… Les gens ne savent même pas si c’est ce dont j’ai envie. J’ai des objectifs un peu plus élevés que de plaire à la gent masculine. »

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Parfois, les questions frisent l’absurde. « Ces dernières semaines, on m’a beaucoup demandé Mais quand tu vas te marier, tu vas faire comment ? Bah, je vais mettre une robe, on verra mes muscles, et ce sera trop bien ! »

« Ce n’est pas féminin, tu ressembles à un homme »

Liée à ces remarques sur la désirabilité des corps musclés, l’idée que les muscles ne sont pas « féminins ».

« On me dit qu’avoir des muscles, c’est masculin. Mais un homme qui n’est pas musclé, on ne lui dira jamais que ses bras fins sont féminins, par exemple. Ça n’a pas de sens, tous les corps sont différents », souligne Eva, agacée.

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Des remarques auxquelles Mélanie aussi a dû s’habituer. « J’en ai marre qu’on me dise que je ressemble à un homme », soupire-t-elle. Interrogée sur les personnes qui lui font ces commentaires, elle répond avec malice : « La plupart du temps, ce sont des hommes et souvent, ils sont moins musclés que moi. J’imagine qu’ils disent ça parce qu’ils n’y arrivent pas, ou qu’ils n’ont pas ma motivation ! »

Capture d’écran fournie par Mélanie
Capture d’écran fournie par Mélanie Capture d’écran fournie par Mélanie

Capture d’écran fournie par Mélanie

Sous les photos de Mélanie, des tweets sexistes qui critiquent son apparence

« Ce sont des phrases avec lesquelles j’ai grandi », confie sur le même ton Djihene Abdellilah, sportive depuis son plus jeune âge. « Djihene, c’est un bonhomme, elle tape comme un mec.On me disait que j’avais les cuisses de Balotelli, on se moquait de mes deltoïdes. Ce qui m’énerve avec ce genre de phrases, c’est qu’elles prouvent qu’on ne peut toujours pas accepter qu’une femme puisse être forte physiquement et mentalement. On est encore reléguées au rang de petites choses vulnérables, faibles. »

« Ce n’est pas naturel, tu dois être dopée »

Sur le podium des phrases qui les agacent, il y a aussi la question du « naturel » de leurs muscles et celle du dopage. « On me dit que ce n’est pas possible pour une femme de ressembler à ça, que je suis sûrement dopée », explique Eva. « Les gens s’imaginent que je me pique à la testostérone », abonde Mélanie. « C’est de l’ignorance totale… Ils n’ont juste pas l’habitude de voir des femmes avec des muscles pareils. Mais ils sont là, on peut les développer aussi, et il n’y a rien de pas naturellà-dedans ! ».

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Aujourd’hui, les deux sportives voient dans ces remarques des preuves de leur réussite. « Avant, ça pouvait me blesser mais maintenant, je sais que c’est la preuve que je me rapproche de mes objectifs », confie Mélanie. Même son de cloche pour Eva : « Même si c’est négatif, ça me booste. »

Pour les femmes, il y a des muscles plus acceptés que d’autres

On pourrait penser qu’à l’heure où les salles de musculation font de plus en plus d’adeptes, les muscles sur les femmes seraient plus valorisés. Mais pour Djihene Abdellilah, il n’en est rien. À 41 ans, la spécialiste en sport de combat a vu la société évoluer, sans que cessent les injonctions sur son corps et sur ses muscles.

« Quand j’avais 20 ans et que j’étais athlète de haut niveau, mon corps, et notamment mes cuisses et mes fesses musclées, était très mal vu. Aujourd’hui, avec l’essor du fitness et les réseaux sociaux, on voit de plus en plus de femmes avoir des corps musclés… mais c’est limité. On peut admettre qu’une femme ait des abdos, des fesses ou des cuisses musclées, mais dès qu’elle a des gros bras, ça dérange. Les muscles répondent encore à une certaine norme esthétique très sexualisée. » Des diktats toujours renouvelés qui continuent à peser sur les femmes. « Il faut arrêter avec ces normes sexistes. »

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« Je me suis émancipée des critères de beauté qui me complexaient »

Ces remarques n’enlèvent rien à la motivation des trois athlètes, qui ont toutes eu à cœur de préciser qu’elles ne se musclaient pas pour le regard des autres. « Je me sens à l’aise dans mon corps avec ses muscles. Je me suis émancipée des critères de beauté qui me complexaient parce que je faisais plus qu’une taille 36. Je suis concentrée sur mes performances sportives et mon bien-être psychologique plutôt que sur un moule dans lequel je rentre ou pas », confie Mélanie. Elle espère atteindre des niveaux de plus en plus élevés de force athlétique en compétition.

Pour Eva, le sport est aussi un moyen de se sentir bien psychologiquement : « Je trouve beaucoup d’épanouissement dans le fait de développer mes muscles, mais aussi de me sentir forte, de pouvoir soulever des choses lourdes. Le sport, ça m’aide à oublier mes problèmes, et ça m’a permis de rencontrer énormément de personnes qui partageaient ma passion. »

« Et quand on me demande si je vais ressembler à un homme, je réponds Non, je vais ressembler à une femme musclée’ et les gens feront avec », conclut Mélanie.

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