Bypass : en quoi consiste cette chirurgie bariatrique ?

Définition : qu’est-ce qu’un bypass gastrique ?
Le bypass est un type de chirurgie bariatrique, au même titre que la sleeve ou que la gastrectomie, destinée à traiter l’obésité sévère.
Dr Saad Joumaa chirurgien digestif et bariatrique : Il existe trois types de techniques employées en chirurgie bariatrique : la technique restrictive qui consiste à réduire le volume de l’estomac, la technique malabsorptive qui a pour but d’empêcher l’absorption d’une partie des calories ingérées, et la technique mixte qui associe les deux. Le bypass est une technique mixte, à savoir à la fois restrictive et malabsorptive.
C’est une dérivation de l’estomac, qui consiste à réduire l’estomac à une petite poche, à retirer la partie supérieure de l’intestin grêle dans laquelle se fait une grande partie de l’absorption des nutriments énergétiques, et raccorder la poche gastrique à la deuxième partie de l’intestin grêle. La partie supérieure de l’intestin grêle vient ensuite se raccorder sur la partie basse pour former une anse biliaire permettant que les sécrétions digestives rejoignent les aliments et que la digestion commence. La plus grande partie de l’estomac, le duodénum et la partie initiale de l’intestin grêle sont donc court-circuités.
Il s’agit d’une intervention chirurgicale lourde, qui nécessite une phase préopératoire et un suivi postopératoire importants, et qui n’est pas dénuée de risques ni d’effets secondaires. « Bien que l’on observe généralement de bons résultats, faire un bypass n’est pas une décision qui doit être prise à la légère », insiste le Dr Joumaa.
Âge, IMC : à qui s’adresse le bypass et quelles contre-indications ?
Cette opération chirurgicale possède des critères d’éligibilité stricts.
- Le patient doit être âgé d’au moins 18 ans et au plus de 65 ans, sauf cas exceptionnels et après réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP). Elle est quoiqu’il arrive proscrite pour les moins de 13 ans.
- Sonindice de masse corporelle (IMC) doit être supérieur à 40, ou entre 35 et 40 mais associé à une ou plusieurs comorbidités liées à l’obésité (hypertension artérielle, diabète de type 2, problèmes articulaires…).
- Absence de contre-indications d’autres spécialistes : addictions aux stupéfiants, cancer actif, troubles psychiatriques graves, troubles du comportement alimentaires sévères…
Mini bypass (Oméga) ou Y : les différentes techniques
Le bypass tel qu’il est effectué historiquement et selon la description ci-dessus, est appelé bypass en Y. « Cette technique est efficace mais l’intervention est longue et complexe, puisqu’il y a deux sutures : une entre l’estomac et l’intestin grêle et une autre au milieu de l’intestin » décrit le spécialiste.
Une autre technique plus simple a donc été mise en place à la fin des années 90, appelée mini bypass ou bypass en Oméga, qui consiste en une seule anastomose pour faire une poche gastrique en forme d’oméga. « Cette seconde technique moins complexe a plusieurs inconvénients, puisqu’elle favorise le reflux biliaire et surtout occasionne beaucoup de malabsorptions alimentaires, avec un risque de dénutrition important » résume le Dr Joumaa. Pour ces raisons, la HAS (Haute Autorité de Santé) a préconisé sa non-prise en charge par la sécurité sociale depuis Septembre 2019 et cette intervention n’est donc quasiment plus pratiquée en France. Elle reste cependant autorisée dans de nombreux autres pays du monde et d’Europe.
Est-ce qu’un bypass est réversible ?
Si le bypass en Y est une opération théoriquement réversible puisqu’aucune partie de l’anatomie digestive n’est retirée, la technique est en pratique assez compliquée.
Dr Joumaa : La réversion du bypass est une opération délicate, qui et doit nécessairement être effectuée dans des Centres Spécialisés en Obésité (CSO) et qui possède un taux de complications non négligeable.
Le bypass en oméga est quant à lui plus facilement réversible.
La réversion du bypass est prise en charge par la sécurité sociale lorsqu’elle est médicalement indiquée, en cas d’intolérance, de diarrhées chroniques, ou autres effets secondaires importants.
Quelle est la durée de l’hospitalisation ?
L’intervention chirurgicale du bypass en Y nécessite en moyenne deux à trois heures de temps opératoire au bloc. « Mais c’est en pratique assez variable en fonction des patients, et ça peut aller d’une heure trente à 5 à 6 heures pour les cas plus difficiles », indique le spécialiste.
L’hospitalisation dure généralement 48 à 72 heures, grâce au programme de réhabilitation précoce dans les CSO.
La convalescence nécessite ensuite un arrêt de travail de 3 à 4 semaines en moyenne. Après un mois, les activités sportives douces peuvent être reprises et il faudra attendre trois mois avant de se mettre au sport plus intense.
Suites de chirurgie : quelles sont les conséquences d’un bypass ?
Le bypass est une opération aux suites importantes auxquelles il est important d’avoir été préparées. Elle nécessite donc un parcours médical préopératoire avec un diététicien et un psychologue.
Après l’intervention, le patient sort avec des antalgiques simples pour la douleur, des anticoagulants, des compléments alimentaires (notamment calcium, fer, folates, vitamine B12 et vitamine D), des antiacides pour limiter le reflux gastrique, des fluidifiants biliaires pour éviter le reflux biliaire et une supplémentation en protéines pour limiter la fonte musculaire.
La taille de l’estomac étant considérablement réduite, le patient ne pourra plus jamais manger comme avant en terme de quantité et devra donc faire davantage de petits repas. « Le patient doit faire au moins 5 à 6 petits repas par jour en mangeant très lentement, et la reprise de l’alimentation après la chirurgie doit se faire très progressivement » insiste le Dr Joumaa.
Les deux premiers jours, l’alimentation doit être exclusivement liquide et lisse. Puis, pendant 3 à 4 semaines environ, le patient doit manger mou, en mixant ses aliments. Ça n’est qu’après cette période les aliments solides peuvent être réintroduits, tout en veillant à fractionner les repas et à manger très lentement pour faciliter la digestion.
Le premier mois suivant l’intervention, les patients sont revus régulièrement par l’équipe médicale pour vérifier que tout va bien et effectuer des prises de sang de contrôle. « L’obésité est une pathologie chronique, le patient doit être suivi à vie » rappelle le spécialiste.
Il devra notamment prendre des compléments alimentaires et vitaminiques à vie, pour éviter les carences aux conséquences potentiellement très graves. « Au bout de plusieurs mois sans supplémentation vitaminique, le patient peut développer des troubles neurologiques sévères pouvant aller jusqu’au coma », alerte le chirurgien.
Parmi les suites opératoire, le patient peut ressentir les trois premiers mois une grande fatigue, liée perte de poids rapide et importante.
Quels sont les aliments interdits après un bypass ?
L’une des complications fréquentes du bypass est le dumping syndrom, aussi appelé syndrome de chasse ou vidange gastrique rapide, qui se manifeste lorsque les aliments, surtout les sucres, se déplacent trop rapidement de l’estomac au petit intestin. Ce syndrome se caractérise par la survenue de plusieurs symptômes très désagréables : douleurs abdominales, nausées, diarrhées, ballonnements, bouffées de chaleur, maux de tête…
« Il faut donc essayer de réduire au maximum la consommation de sucres rapides de son alimentation pour éviter ce phénomène » insiste le Dr Joumaa. Les boissons sucrées – et plus encore lorsqu’elles sont gazeuses – sont notamment à supprimer.
Les boissons alcoolisées doivent également être très fortement limitées, voire idéalement supprimées, car ses effets sur l’alcoolémie sont décuplés après un bypass. L’alcool passe plus rapidement dans le sang, le pic d’alcoolémie est donc plus important et plus rapide, avec des risques de conduites dangereuses augmentés.
Pour éviter une fonte musculaire importante liée à l’amaigrissement rapide, il est essentiel de manger suffisamment de protéines et de faire du sport régulièrement.
Quelle est la différence entre la sleeve et le by pass ?
La sleeve fait également partie des opération de chirurgie bariatrique, mais elle est uniquement de type restrictive, et non malabsorptive comme le bypass.
La sleeve consiste uniquement à couper les 3/4 de l’estomac afin de limiter le volume gastrique, c’est donc une opération plus simple et plus rapide. « A la différence du bypass, la sleeve est une opération irréversible » précise le chirurgien.
Perte de poids et résultat : combien de kg perdus le 1er mois après un bypass ?
La perte de poids après un bypass est assez variable en fonction des patients et du nombre de kilos qu’ils ont à perdre. « La perte de poids le premier mois est généralement d’au moins 5 kg, mais peut aller jusqu’à 20 kg chez certains patients dont l’excès de poids est particulièrement important » résume le Dr Joumaa, qui rappelle au passage qu’une perte de poids très rapide n’est pas forcément bon signe.
À terme et d’après les études d’observations faites depuis des dizaines d’années, le bypass permet au patient de perdre entre 55 et 65 % de son excès de poids à 5 ans après l’opération, sachant que la majorité de l’amaigrissement se fait au bout de 2 ans. L’excès de poids correspondant à la différence entre le poids de départ et le poids de forme, objectif à atteindre pour le patient. Par exemple, une personne de 150 kg qui souhaite en peser 80, a un excès de poids de 70 kg. S’il réussi à atteindre 100 kg et à les maintenir après 5 ans de bypass, il sera à 65 % de perte d’excès de poids.
« Ces chiffres correspondent à une moyenne mondiale, mais en pratique certains patients arrivent à perdre 100 % de leur excès de poids voire plus, pour atteindre leur poids de forme ou même le dépasser » précise le chirurgien.
On considère que le bypass est un “échec” lorsqu’il n’a pas permis une perte d’excès de poids supérieur à 50%.
Quel est le prix d’une opération bypass ?
D’après la codification CCAM de la sécurité sociale, l’intervention en elle-même coûte 850 euros. A ce prix, s’ajoutent le prix de l’hospitalisation qui est en moyenne de 1600 euros pour une chambre simple, mais qui peut doubler si le patient présente des risques (apnée du sommeil par exemple) et doit être hospitalisé en soins continus.
Au total, le prix d’un bypass peut donc aller de 4 à 8 mille euros, avec une prise en charge variable en fonction des mutuelles.